Marraine du TIP 2024
Halba DIOUF
« L’inclusion dans le sport ne devrait pas être une question de courage et de bonne volonté »
Femme transgenre, Halba Diouf a été privée des Championnats nationaux par la Fédération française d'athlétisme, qui l'a retirée de la liste des inscrits. Mais la jeune sprinteuse de 21 ans compte bien se battre pour continuer d'apparaître en compétition.
Je suis fière d’avoir été choisie pour être la marraine du Tournoi International de Paris (TIP) pour l’année 2024. Cette place, toute particulière, est pour moi l’occasion de faire vivre mes engagements.
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J’ai commencé mon parcours par la sociologie et la géopolitique avant de me spécialiser dans la politique européenne (à Sciences Politique d’Aix-en-Provence).
En parallèle de mes études, j’interviens dans le domaine de l’accompagnement personnel et spirituel, qui m’amène, lors de conférences, à sensibiliser sur la santé psychique auprès de divers publics (entreprises, associations, mairies, fondations, etc.).
Enfin, je suis une athlète de haut niveau, mais aussi, une femme transgenre, et j’ai à cœur de me battre pour le respect des droits des personnes transgenres, tout particulièrement dans le domaine sportif.
C’est en ce sens que j’ai accepté ce titre, car je suis convaincue que le TIP a un rôle à jouer dans la convergence des luttes pour la santé, et l’égalité des droits, et ce, à travers l’Europe.
Tout au long de l'histoire, les femmes ont dû faire face à de nombreux obstacles pour pouvoir faire du sport librement.
Les athlètes féminines ont trop souvent été exposées à des processus intrusifs de vérification du genre, des inspections médicales des organes génitaux externes, ou encore des tests chromosomiques qui ont produit de nombreux faux positifs et ont eu des répercussions catastrophiques sur la carrière des athlètes.
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De nombreux organismes sportifs font circuler des mythes nuisibles et violents sur les femmes trans ; évoquant une supposée submersion du sport féminin ou un simple déguisement de la part d’homme cis.
Ces arguments fallacieux, en plus d’être profondément transphobes, menacent la sécurité des femmes transgenres dans le domaine sportif et au-delà. Ces mensonges témoignent d’une dangereuse méconnaissance des identités, des expériences et de la réalité où les femmes transgenres sont sous-représentées dans le sport, notamment au niveau d’élite.
Le Comité International Olympique (CIO) a publié, au mois de novembre 2022, un Cadre juridique sur l’équité, l’inclusion et la non-discrimination sur la base de l’identité sexuelle et l’intersexuation. Ce texte pose les bases pour les événements sportifs de haut niveau d’élaborer leur propre réglementation, conformément aux principes inscrits dans la Charte Olympique et au respect des droits humains.
Toute personne doit pouvoir pratiquer un sport sans discrimination, d’une manière qui respecte sa santé et sa dignité, dans le cadre de critères d’admission qui garantissent l’équité des compétitions sportives, surtout pour les femmes. Mais aujourd’hui, tou·te·s les athlètes transgenres, dont je fais partie, se font refuser la participation aux compétitions sportives. Nous sommes constamment opprimé·es, discriminé·es du fait de notre identité.
Le combat que je mène, ne concerne pas uniquement les femmes transgenres, mais l’humanité tout entière. Exclure les femmes trans nuit à TOUTES les femmes. Une femme trop rapide, trop grande, trop masculine, trop forte… des femmes cis ont déjà été accusées d'être trans, et ces accusations affectent de manière disproportionnée les femmes. Les femmes trans ne représentent pas de menaces : nous ne sommes pas une menace !
En revanche, de nombreux obstacles qui menacent réellement l'équité dans la catégorie des femmes devraient pouvoir être adressés : rémunération inégale, violences sexuelles et sexistes endémiques, intimidation, harcèlement moral et physique, manque de diversité et de représentation et de diversité, etc. Tant de problèmes dont les femmes trans ne sont pas responsables.
Tant que nous fermerons les yeux sur la douleur des opprimé·es, de rejet, d’exclusion, de bannissement, nous ne pourrons jamais avancer et en particulier échapper à ses origines. Le seul garde-fou dont peuvent bénéficier les femmes trans, c’est le droit de vivre libre, libre d’exister, libre d’exercer le sport et de courir dans la catégorie qui est la leur (et cela leur est refusé). La promesse de l’égalité des droits n’a jamais été remplie, et à mon sens, il s'agit là d'un problème non pas d'équité, mais de défaillance du système !
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Je souhaite de tout mon cœur que la société avance dans cette voie, et c’est là toute la force de mon combat. N’ajoutons pas à la souffrance de naître dans le mauvais corps, l’exclusion et le mépris total de la société. Pour que l’égalité entre toutes et tou·te·s ne reste pas une promesse, que tout le monde soit accepté pour ce qu’il ou elle est.
Je suis profondément reconnaissante de faire partie de cette merveilleuse aventure et j'espère que nous vivrons trois jours inoubliables. J'ai à cœur de vous faire part de mon expérience et de découvrir la vôtre. J'attends avec impatience de vous rencontrer toutes et tous !
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Halba